Et justement, celui-là, il n’en faisait pas parti de mes envies (facile…) Trop entendu parler de lui, trop loué … La libraire en me le prenant des mains qui ajoute, « Mérite pas tant », avec l’air de lui en vouloir personnellement au bouquin. Je m’apprêtais à ne pas aimer du tout, donc, ce qui fut fait. Pourquoi lire ce livre alors ? Ben, parce que ce jour là j’avais des bus à prendre et beaucoup de temps à attendre entre les bus et que j’avais oublié « Tout ce que j’aimais » chez moi ( le titre que j’avais commencé la veille) et que un livre court et qu’on ne va pas aimer est tout simplement un choix logique quand on va prendre le bus et que l’on passe devant une librairie qui le vend en poche.
Qui plus est, il se trouva être parfaitement adapté à mon moyen de transport. Comme il a été beaucoup lu, encensé, etc … il m’a donné droit à un ou deux sourires, à un ou deux regards sous-entendus, un coup à vous transformer le bus urbain en blog de lecture de fans de « La liste de mes envies ». Enfin, toutes proportions gardées, la plupart des passagers normaux continuant quand même à lire leurs textos et à téléphoner pour dire à quelle station ils en étaient de leur trajet …. Faut pas rêver de tant de bonheur ni d’idéalisme naïf.
Or d’idéalisme naïf, ce livre ne s’en montre pas avare. Et ron et ron, il était une mercière, et ron et ron, il était un petit patachon qu’ était contente d’être une mercière patachon. Une mercière qui ne gagne pas un rond, qui est sur le retour d’âge, dont le corps se laisse aller, dont le mari, son Rudolf Valentino à elle, s’enfile des Tourtel devant son téléviseur Radiola, après lui avoir craché sa colère à la figure et lui avoir fait toucher le fond à sa moitié, cause que ce serait sa faute à elle si le dernier bébé était mort né. Mais la mercière cache des beautés secrètes, notamment un coeur pur, dirait l’ermite de Manu, et un blog de tricot qui remonte le moral à des tas de petites vieilles, et deux super copines coiffeuses, jumelles en quête d’homme (s) pour toujours, à la cuisse légère, qui lui font des manucures gratos, vu qu’elles n’ont pas beaucoup de clientes non plus et un peu pitié d’elle aussi. Mon dieu … Pour un peu, j’en serais devenue pro capitaliste, par esprit de contradiction…
La mercière, elle va gagner une fortune au loto, mais elle ne va rien dire, non, non …. au lieu de grimper aux rideaux du luxe et de la facilité, elle va choisir de garder son petit coin à elle de tapis en classe éco. Elle qui rêvait d’être l’Ariane de Solal et qui n’a eu droit qu’aux bruits de la chasse d’eau de l’amour et au camping avec attractions en plastique, ben finalement, elle se rend compte que c’est ce qu’elle préfère, et d’égrener la liste de ses envies, à elle, bien modestes, de ses envies à lui, de pacotilles. Elle veut garder ce qu’elle a et continuer à aimer ce peu là, avec juste des petits trucs en plus, mais qui ne dérangeraient pas son ronron pataton.
On comprend alors le goût pour ce livre, si à contre courant des « choses modernes » : il égrène quelques jolies images de l’enfance de Jo (la mercière), de sa mère artiste, de son père qui l’aimait, mais on se croirait dans les années 50 côté condition féminine et vision du couple, Jo sort d’une sorte de roman photo à l’envers ; finalement, hein, contentons-nous de ce la vie nous donne, et puis ma bonne dame, l’argent ne fait pas le bonheur, il ferait même le malheur, le saligaud, si on le laissait faire…
Honneur donc à la mercière qui fait de la résistance à l’appât du gain et à la consommation de luxe facile… une nouvelle femme libérée va enfin naître ! Vive Moulinex et à bas la libération sexuelle ! ( j’exagère un peu parce qu’à la fin, on a quand même droit au coup du prince charmant et à la crapaude qui renait de ses cendres …)
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