Nos plus beaux souvenirs, Stewart O’Nan

Ouf ! les vacances sont finies ! Pas les miennes mais celles de la famille Maxwell, et tout le monde a survécu, même moi. Pourtant, ce n’était pas gagné, pour eux, surtout pour eux, parce que moi, finalement, je n’étais que de passage … Pourtant, leurs vacances ne durent qu’une semaine. Une semaine, ça peut-être long ou court. Et là, c’est long, surtout pour eux, pour moi aussi quand même un peu …. surtout vers la fin, quand ça s’étire en heures, la semaine, le départ …

Les vacances commencent un samedi, tous les membres de la famille convergent de leur point de départ à leur point d’arrivée, le cottage familial, les pieds dans le lac de Chantagua, au nord de l’état de New-York. Il y a la mère, Emily, la tante, Arlène, qui viennent dans la même voiture, dans une autre, le fils Max, la femme Lise, leurs deux enfants, les vélos sont accrochés à l’arrière, et dans le minibus, jonché de boites de nourriture toute faite, la sœur et ses deux enfants aussi, une fille (un peu rebelle, mais bon, la mère est un peu flinguée aussi, en plein divorce et dépressive), un garçon, juste comme il faut, d’ailleurs il s’appelle Justin et fera fort peu parler de lui pas la suite, donc autant le faire maintenant.

Depuis des années, la famille se retrouve là, au bord du lac. L’année prédente, ils n’ont pas pu parce que le père, Henry, était en train de mourir. ça leur a presque manqué, en fait, le père aussi évidemment. Et cette année, c’est la dernière fois parce qu’Emily a décidé de vendre de le cottage. Pas pour les embêter, non, mais parce qu’elle a demandé avant qui en voulait faire quoi et personne n’a rien dit, alors que maintenant, ils se révèlent contre. Mais pas de grands débats ni de grandes fureurs dans cette famille-là où les rôles paraissent fixés et boulonnés. Emily décide et fait la cuisine, ils se méfient d’elle, elle griffe parfois, ses enfants semblent lui en vouloir de son indifférence, de sa place, de ses décisions, d’une sorte de mépris ou de trop grande attente envers eux. Ou les deux ensemble.

Au lieu de parler, donc, ils accomplissent des rituels ; un peu toujours les mêmes, cautionnés par les années comme presque leur seul garant que ce sont bien des « vacances » : le parcours de golf, la sortie à pneu sur le lac, le barbecue, l’embarcadère comme point de fuite, le banc comme horizon, la promenade du chien, devenu plus vieux, c’est tout, le restaurant et le feu d’artifice du dernier soir. Quelques variantes quand même pour cette dernière année : le putt’ and putt’ a fermé, l’enlèvement de la serveuse de la station service du coin et une visite des chutes du Niagara pour cause de pluie.

N’allez pas croire pour autant qu’il se passe quelque chose, il ne se passe rien. Il y a bien Sam ( le petit fils) qui vole la montre de sa belle cousine, les deux cousines qui voient un beau garçon en se promenant, une panne d’électricité pour une raison inconnue, un soir, et deux soirs de suite, ( mais oui, mais oui …), l’alarme de la maison des voisins qui se déclenche pour une raison qui restera inconnue, et le pauvre Justin qui se trompe de liquide pour le lave vaisselle et du coup, il y a de la mousse partout dans la cuisine.

Dans ce vase clos d’ennuis et de rancoeurs assourdies, se croise Mag, la looseuse, celle qui n’y arrive pas, qui est en train de divorcer, celle sur laquelle on peut compter pour toutes les déceptions de ses parents, son frère, Ken, sur lequel  on comptait un peu plus, mais non, finalement, il vivote rêvant de gloire photographique, hermétique à toute imagination, il fait de son mieux, sa femme Lise, enfant gâté, hermétique à tout ce qui n’est pas elle et lui, même à leurs enfants et surtout à sa mère, Emily, dont se demande quand même ce qu’elle a bien pu faire (mais on ne le saura pas). Ferme la marche, la tante au chien, l’institutrice célibataire qui aurait bien voulu garder la maison, mais, bon, elle prendra la télévision qu’on lui donne.

Autour d’eux, du cercle qui tourne en rond, s’alignent les bibelots, les beaux souvenirs s’y accrochant comme à de dérisoires pendules du temps qui est passé : six verres avec dessus une voiture ancienne différente, le père y buvait un whisky, parfois, une salière et une poivrière en forme de petits cochons, un briquet zippo, un puzzle que personne ne finira jamais.

C’est l’infraordinaire qui raconte l’ordinaire et prend la place des paroles. C’est beau, mais c’est lent, je ne savais pas que l’ennui pouvait être raconté d’aussi prégnante façon. C’est d’une beauté qui s’écoule lentement, en quelque sorte .

Il semblerait que l’on retrouve Emily dans un autre roman de cet auteur,  » Emily« , peut-être que là on en sait davantage … Mais j’en doute, pas le style thriller, le bougre d’O’Nan!

 

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