Il faut donc suivre un parcours sinueux à la poursuite d’un livre qui a pour titre « Histoire de l’amour », dont l’auteur n’a tiré aucune gloire mais la jeune fille qui porte le prénom de celle pour qui il a été écrit, Alma, raconte l’histoire d’Alma.
Alma bis raconte son histoire, celle de son frère Bird, celle de sa mère qui pourrait se nommer Pénélope. Au départ, il n’est pas question du livre, mais du père, solaire, aventurier, qui est mort et qui pèse lourd. Son ombre gère leur quotidien et la première quête d’Alma est celle d’une autre histoire pour sa mère. Il s’agit de la tirer de son engourdissement sentimental, car toujours amoureuse, elle se cantonne dans le fantasque dépressif. Pour Alma, la tâche est rude, trouver un amoureux pour une traductrice d’écrivains exclusivement morts, et qui reste en pyjama toute la journée, n’étant pas chose facile, quand on a quatorze ans, de la peine au coeur, sans compter un frère qui s’est pris pour un oiseau avant de se consacrer à une carrière exclusive d’élu du dieu juif. Alma complote des rendez-vous voués à l’échec mais qui vont la mettre sur la piste du livre qui parle de l’amour pour l’autre Alma.
Pas très loin de chez Alma, à Chinatown, vit Léo, vieux célibataire, bourru et asocial. Autrefois, dans un autre temps, celui d’avant l’extermination, et dans un autre lieu, la Pologne, il a été l’amoureux éperdu de la fille la plus aimée du monde. maintenant, il cohabite plus ou moins pacifiquement avec son voisin, Bruno, couple bancal dont le lointain passé est devenu flou. Léo fut serrurier, il sait crocheter les secrets, même si le sien est enfoui depuis longtemps à l’intérieur d’un cœur fichu. Il tape une histoire sur une vieille machine et une fois par jour, il s’arrange pour que son vieux corps délabré soit vu, au moins une fois, être regardé. Ce qui n’est pas toujours du meilleur goût pour ses victimes, d’ailleurs …
Plus loin, beaucoup plus loin, un autre exilé, Zvi Litvinoff, cache un manuscrit, dont le voyage est peut-être achevé, alors qu’un autre écrivain est mort, tout près d’Alma, qui ne sait toujours pas ce qu’elle cherche, mais qui aurait pu le trouver. Du coup, le livre aurait été un conte de fées, mais finalement, c’est juste un poil trop tard pour tout le monde, même si c’est très bien comme cela, finalement.
Un livre qui raconte des rendez vous manqués en réussissant à être drôle, ce n’est pas courant. Rechercher des amours manqués à tâtons demandent un peu d’attention au lecteur, c’est sûr, mais la drôle de gravité des personnages mérite de les suivre dans leur quête un rien déjantée. Leurs histoires reconstruit un puzzle magique, auquel, comme tout puzzle normalement travaillé, il manquera finalement, une seule pièce.
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