Comme son nom l’indique, ce Du Maurier là appartient à la veine plutôt gothique romantique des romans de la grande dame. Point de tension psychologique à la Rebecca ou à la cousine Rachel, peu de noir de l’âme humaine, mais du grand amour à foison, un air de l’appel du large à larguer les amarres dans l’histoire de la belle Dona et de son pirate de Français qui lui ravira à jamais le cœur … A l’ombre d’une crique idyllique qui a le gout des embruns interdits …
Au départ, la très belle lady Dona Saint Colomb est une lady qui s’ennuie tellement dans son mariage et les mondanités de sa vie de grande dame, qu’elle s’évertue à créer un tourbillon de mauvaise vie autour d’elle. Elle s’encanaille dans les bistrots de Londres. En belle compagnie quand même, dont celle de son mari, qui a tendance à rapidement crouler sous les tables, et celle du meilleur ami de celui-ci, Lord Rockingham, qui se verrait bien en amant en titre de la fantasque lady. Mais Dona ne goûte point de ces vils plaisirs. Dona aspire à être autre, elle même, donc.
Pour cela, elle prend ses deux enfants et une domestique dans une calèche et dévale les routes jusqu’au domaine de Narvon en Cornouailles, plantant la belle compagnie sans autre explication qu’une simple histoire d’oiseau qui avait une belle cage, mais qui, quand même, saisit la première occasion de s’envoler vers le grand large.
Narvon est un domaine abandonné, où, solitaire, un seul domestique a veillé à tout autre chose semble-t-il qu’à un séjour de Lady et de Lord Saint Colomb en ses murs. S’il se met au service de Dona et de ses caprices fantaisistes, ce n’est pas sans un sourire en coin, prometteur de bien des secrets. Rapidement, Grace au crayon magique de Daphné du Maurier, les pelouses se couvrent de fleurs bucoliques et Dona peut s’y rouler à loisir avec ses enfants, au mépris des conventions, dont elle ne veut plus entendre parler !
La rivière coule en bas du domaine, se jetant dans la mer, comme Dona dans les bras de la liberté. Et un soir, au couchant, se dessine dans un ciel flamboyant les ailes d’un voilier comme surgi des flots providentiels …
Et voilà, vous avez tous les ingrédients, il n’y a plus qu’à laisser se dérouler le fil de l’intrigue telle qu’elle ne peut qu’être, lady emportée par la passion (mais en retenue quand même) déguisée en mousse qui n’a peur de rien , pirate droit et fier au courage audacieux et insolent, fidèles marins bretons qui œuvrent sans relâche, torses nus aux cordages, notables et aristocrates locaux volés sous leur propre barbe, le teint rougeaud et la perruque de travers, fulminant en gardiens de l’ordre ridiculisés par l’insaisissable français, et la Dona partagée entre passion et raison …
La nature se peuple de signes : d’engoulevents et de mouettes, les arbres bruissent autour des amants, comme rôdent les dangers venant des obtus lords et maris, ce monde que Dona a fui et qui, sans cesse la rattrape de ses doigts crochus …
Une lecture qui se doit de se couler dans le modèle voulu, sinon, elle ne fonctionnera pas, elle demande une lectrice parfaitement consentante à toutes les conventions romanesques, elle !
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