Ma chérie, Laurence Peyrin

Gloria n’a pas toujours été belle, soignée, bichonnée par son riche amant, GG. Elle n’a pas toujours eu une hygiène de vie digne d’une belle pouliche pour millionnaire américain qui ne souhaite pas divorcer et qui promène son trophée dans les fêtes mondaines. Elle n’a pas toujours porté du Courrèges, chaussée de gogo boots à talons d’au moins huit centimètres, au bord d’une piscine d’un hôtel de luxe à Miami, entourée d’amies dont les badinages sont autant de ragots venimeux. Elle n’a pas toujours été entretenue par le prince de l’immobilier dans une hacienda à la nature canalisée, entourée de tout le kitsch de la Floride des nouveaux riches. Gloria, sans être tout à fait dupe de la comédie jouée, s’en satisfaisait depuis dix ans.

Celle que l’on appelle que « ma chérie », estime qu’elle a bien gagné sa place privilégiée. Elle a grandi auprès de parents quelque peu sinistres, dans un bled sinistre aussi. Bigleuse aux genoux cagneux, elle attrapait des écrevisses dans la mangrove en montrant sa petite culotte à Benjamin, le fils du patron de la scierie locale, ce qui lui valait des roustes paternelles. Son destin semblait bien s’accorder avec le néant, lorsque qu’à seize ans, son corps se transforme et la propulse flamand rose : Miss Floride 1952 en bikini rouge. Elle prend alors la route d’une Marilyn Monroe, un peu moins cassée par la vie quand même, et s’arrête dans les bras du beau promoteur, sans passer par la case star de cinéma.

Ma chérie est campée rapidement dans une figure de poupée Barbie, mais avec un humour qui la rend sympathique. Alors, quand son monde éclate, lui claque la porte au nez et que, munie de sa seule valise, elle prend le bus pour retourner à son point de départ, le village paumé et la maison familiale, on plaint ses escarpins. Mais c’est dans ce bus, avec sa blondeur à la Jane Mansfield, et les talons hauts vacillants, que Ma chérie va jouer sa Rosa Parks. Un peu par surprise, ou par naïveté, vu que dans sa cage dorée de Miami, les afro américains et la ségrégation, c’était terra incognita. M’enfin, Ma chérie et Rosa Parks, ça fait deux quand même, tant sur le plan physique que politique…. Et Gloria, perdue, marginale, fait sourire à ses dépends dans ses tribulations de son retour à la normalité, robes faites maison et souliers plats. Le récit a une légèreté finalement entrainante, même si la ségrégation a des reflets de lunettes de soleil portées par Jacky Kennedy et une fin en coucher de cinémascope, et il aborde aussi des sujets collatéraux, comme l’impossible retour à la case départ, tant pour ma chérie que pour Benjamin, son amour d’enfance, déchiré par le Vietnam.

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