Prémices de la chute, Frédéric Paulin

48881Après « la guerre est une ruse », ce deuxième tome dessine un autre théâtre du chaos. Après l’Algérie, il étend le terrain à une Europe inconsciente. Le chaos est toujours planifié, et se nourrit de la bête immonde dont les tentacules se rapprochent de l’épicentre. On le comprend très vite, si le roman commence par les braquages du gang de Roubaix en 1996, c’est pour se terminer le 11 septembre. Ce ne sont pas les mêmes terroristes, ce ne sont pas les mêmes organisations, mais les liens forment un seul puzzle, indéchiffré en son entier quand on a le nez dessus, comme c’est le cas pour les différents personnages qui se démènent pour détisser la toile. En vain.

Tedj Benlazar, le héros du premier tome, s’est un peu réconcilié avec lui même mais reste un pion en purgatoire pour sa direction. Il est envoyé à Sarajevo. C’est presque la fin de cette guerre là, qui nourrira la suivante. L’agent flaire des pistes, notamment du côté des djihadistes mis au chômage par l’intervention de l’ONU et qui se reconvertissent dans le banditisme pour nourrir la pieuvre qui, en Afghanistan, organise ses forces dans les montagnes. Mais Tedj, lui, prêche dans le désert.  Laureline Fell, enquêtrice à la DST, qui a su le toucher au coeur à la fin du premier tome, et sa fille, Vanessa, le consolent quelque peu de sa solitude.

Vanessa, en se glissant par hasard, dans le lit d’un piètre journaliste, Reif Arno va faire  levier entre les deux hommes. Les parents d’Arno vivaient à Sarajevo, ils se sont exilés dans le nord de la France juste après  la mort de Tito. Et donc, c’est par les actualités télévisées que le jeune homme a fait la connaissance de son pays d’origine. Devant les images du siège, ses parents se sont tus. Lui a raccourci son nom, Arnotovic, pour ne pas passer pour un serbe. Il voulait être reporter de guerre, il est journaliste de faits divers à Lille. Accro à la cocaïne, il drague dans les bars jusqu’à plus soif. Puis, c’est l’urgence, le rédacteur en chef l’envoie sur les lieux de sa première scène de crime : des gendarmes se sont fait descendre à l’arme de guerre dans la banlieue de Roubaix. C’est le premier braquage du gang, et Vanessa, 17 ans, est dans son lit.

« On ne se prépare pas à la guerre » est la première phrase du roman., qui est construit comme un thriller, très documenté et terriblement efficace. Les rebondissements claquent comme des avertissements, mais  ni les services d’espionnage, ni les politiques ne réalisent l’ampleur de la toile qui est déjà tissée, de Londres, d’Afghanistan, du Pakistan, vers 2001 qui ne voit rien venir. Alors, évidemment, maintenant que l’on sait, on peut trépigner devant les aveuglements qui ont permis que les Twin Towers soient pulvérisées, devant une forme de naïveté ou un sentiment de toute puissance, mais l’auteur a aucun moment ne juge, nous laissant même des moments pour reprendre notre souffle. Du côté de Paimpol, au moins, rien ne change … Et Vanessa s’y construit un cocon, en attendant le troisième tome, « La fabrique de la terreur », dont le titre fait froid dans le dos, même si là aussi, on se doute du déroulé inévitable.

8 commentaires sur “Prémices de la chute, Frédéric Paulin

Ajouter un commentaire

    1. J’ai mis du temps à me décider moi aussi. En fait, j’étais même persuadée que le sujet, quasi en prise directe sur l’actualité, n’était pas pour moi … mais , j’ai plongé et le troisième tome sera pour bientôt.

      J’aime

    1. Si tu as réussi à lire le premier tome, le second passera presque tout seul. Il est vrai que ce décryptage de notre passé récent est plombant, cat il est tellement crédible et convaincant !

      J’aime

Répondre à Athalie Annuler la réponse.

Un Site WordPress.com.

Retour en haut ↑