Les sirènes m’ont ramenée vers la figure de Pénélope revue et corrigée par des autrices contemporaines. Après la triste silhouette figée dans l’ennui de Sans plus attendre, je me suis tournée, grâce aux conseils laissés dans les commentaires, vers la version de Atwood, me disant qu’avec cette autrice, la Pénélope aurait peut-être, on peut rêver, renvoyer son Ulysse aux calendres grecques. Vingt ans à entendre parler de ses exploits sans que monsieur le héros ne daigne donner de ses nouvelles tout multipliant les coups de canifs dans le contrat de mariage aurait bien mérité un retour un tant soit peu orageux …
Atwood ne va pas jusque là, elle garde le fil tissé par Homère mais s’en amuse, comme Pénélope elle-même d’ailleurs qui nous conte son point de vue depuis le champ des Asphodèles. Pur esprit désormais, elle s’agace de l’aura d’Ulysse, toujours par monts et par vaux ( les immortels peuvent, en passant par le fleuve de l’oubli, refaire un tour dans le monde des vivants) se moque de son propre mythe, et surtout règle ses comptes avec sa cousine Hélène, sexe symbole narcissique et évaporé. Morte, Pénélope ne se gêne plus pour remettre à leur place les chants des aèdes et fait de son rusé Ulysse, un fieffé menteur, dont elle ne fut jamais dupe. D’ailleurs, suggère la narratrice, elle même ne fut pas sans pratiquer l’art de la tromperie hypocrite.
L’autrice joue des anachronismes et propose une réécriture féministe assumée, mais pas tant dans la réinvention du personnage de Pénélope que dans la dimension virulente qu’elle donne aux servantes qui composent un choeur aux accents de plus en plus pathétiques et combatifs. En effet, 12 servantes furent assassinées par Ulysse et Télémaque, pendues à un mat de bateau, en ligne, pour avoir été infidèles à leur maitresse en fricotant avec les prétendants. Elles sont les oubliées de l’histoire qui ne retient que le massacre des prétendants, négligeant cet ultime crime des héros virils et sa gratuité.
Alors, Atwood fait entendre leurs voix d’esclaves, malmenées par l’histoire mais aussi misérables de leur vivant, violées, manipulées, utilisées … Elles règlent leur compte et accusent les figures de proue du récit de lâcheté, de parjure et de dissimulation. Une tout autre Pénélope se dessine alors, bien moins fidèle et passive … Provocatrices iconoclastes, elles réclament justice à qui n’a pas voulu les entendre, elles se font porte parole d’un récit sous jacent, celui que les légendes grecques n’ont jamais porté jusqu’à nos oreilles.
Un court texte, jubilatoire, avec pleins de coups d’épingle dans l’histoire, ironique et qui vous retourne la patience de Pénélope vers d’autres hypothèses, bien plus troubles !
Que la lecture de ce texte m’a ennuyée !
J’aimeJ’aime
Tiens donc ? La « réinvention » de Pénélope n’est peut-être pas particulièrement percutante, mais je l’ai trouvée bien dynamitée par les interventions des servantes qui donnent un autre angle de vue.
J’aimeJ’aime
Allons bon, moi j’ai beaucoup aimé! ^_^
J’aimeJ’aime
C’est d’ailleurs suite à ton commentaire sur l’ennuyeux sans plus attendre que je l’avais noté, et effectivement, cette réécriture çi est bien plus fine et drôle.
J’aimeJ’aime
J’étais plutôt séduite par ton billet et boum ! le commentaire de Sandrine. Bon, je verrai à la bibliothèque, ça ne coûte rien d’essayer.
J’aimeJ’aime
Mais il y a le commentaire de Keisha, ça compense ! Ce n’est pas un grand Atwood, bien sûr mais à mon avis, ça vaut le coup de tenter.
J’aimeJ’aime
Je connaissais « La Servante écarlate » mais c’est tout. Le sujet est intéressant. A voir…
J’aimeJ’aime
Evidemment, à côté de La servante écarlate, c’est un titre plus anecdotique ! Parce La servante, c’est un sacré choc quand même. Si tu n’y mets pas trop d’attentes, c’est effectivement un titre « à voir ».
J’aimeJ’aime
Le thème peut m’intéresser, il faut voir…
J’aimeJ’aime
C’est finement bricolé ! Le choeur des servantes rehausse la parole de Pénélope, et j’ai bien aimé cette déconstruction du personnage sur la fin.
J’aimeAimé par 1 personne
Chic, il m’attend dans ma PAL. J’espère l’apprécier autant que toi.
J’aimeJ’aime
J’espère aussi ! Je lirai bien sûr ton avis avec curiosité.
J’aimeAimé par 1 personne
réécrire l’histoire à la lumière du féminisme me semble difficile et ne permet certainement pas de comprendre la situation des femmes dans l’antiquité
J’aimeJ’aime
Effectivement, comprendre la situation de ces femmes ne semblent pas vraiment possible, disons qu’ici, on est plutôt dans un exercice de style.
J’aimeJ’aime