De mères en filles, Maria José Silveira

imagesPlutôt qu’une saga familiale, c’est un passage de relais de mères en filles, parfois des mères qui ont à peine le temps de l’être, parfois certaines deviennent grand mère, mais alors, elles passent à l’arrière plan : un chapitre, une fille, un amoureux, la fille devient mère et on passe à la fille qui devient mère et a un amoureux … Dix neuf chapitres et un empan temporel qui va de 1500 aux années 2000, alors, on n’a pas le temps de trainer … C’est comme une matriochka, mais brésilienne avec des poupées qui se métissent de plus en plus au gré des conquérants ou des esclaves.

Inaja est l’ancêtre, elle appartient à la tribu des Tupiniquim qui voit arriver les douze navires emplis d’hommes velus. Elle a douze ans quand le mousse portugais Fornao en fait sa première femme et la première mère. Elle a juste le temps de donner naissance à Teberété, avant que le couple ne soit massacré par les Tupinanbas. Inaja avait une tâche de naissance, un triangle sombre à la base de la nuque, le sommet pointant à gauche, et Teberété a hérité de son père ses yeux verts. Ces deux caractéristiques se retrouveront de manière aléatoire chez leurs descendants, marque des origines « sauvages » et marque du premier métissage.

En ces temps confus, la tribu de Teberé est anthropophage, Portugais, Français, Hollandais débutent dans le trafic du bois brésil et l’exploitation des indigènes, dans la mise au rebut de la culture autochtone et des savoirs faire ancestraux … De filles en filles, on suit les étapes de la colonisation, de plus en plus « civilisée », mais pas vraiment en ligne droite parce que le destin malmène ces femmes qui vont du haut en bas de l’échelle sociale en fonction des hommes qui les raptent ou les aiment. Petit à petit,  les pirates blancs deviennent des propriétaires de plantations, des aventuriers, des esclavagistes. Souvent bels hommes et beaux parleurs, ils n’ont cependant qu’un rôle secondaire dans le récit, où ils se succèdent en copie conforme les uns des autres. Seul se détache un attendrissant sculpteur de vierges à la blanche chevelure. Les filles ne sont pas non plus toutes angéliques, guérisseuses, artistes, mais aussi  enfants gâtées insupportables, neurasthéniques ou suicidaires, propriétaire agricole sans pitié pour les esclaves.

Le récit retrace les étapes de la construction de l’identité brésilienne, l’arrivée des esclaves africains pour pallier les carences des esclaves indigènes, La lumière de Rio de Janeiro, la folie de Brazzaville, la proclamation de la république, sa spoliation par les forces libérales … Le principe narratif garantit le rythme de lecture mais en survol frustrant. En tout cas, moi, il m’a manqué des repaires pour m’imprégner de la dimension historique, les différentes guerres et révoltes contre les hollandais et portugais ne sont évoquées que le temps d’une seule fille. Elles se succèdent tellement rapidement que j’ai eu l’impression de voir passer des silhouettes, le fil qui les relie se dissout, la marque de naissance et les yeux verts ne sont pas des liens assez puissants et restent aléatoires et ponctuels, comme des rappels en clin d’oeil …

Le schéma se répétant à chaque chapitre : je vis, j’accouche, je meurs, on frôle assez rapidement la lassitude, malgré l’intérêt pour la toile de fond. En positif, la simplicité du style permet de passer sans effort d’une fille à la suivante. (d’ailleurs,en me relisant, je me demande si c’est vraiment un compliment, ça)

Un avis plus positif et qui m’a donné envie de découvrir ce titre ici, chez Lectures sans frontières

13 commentaires sur “De mères en filles, Maria José Silveira

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    1. On avance quand même dans le temps historique, ce qui permet quelques variations, mais c’est vrai que les différentes figures finissent par se confondre dans une sorte d’uniformité.

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  1. bon je vais donc ne pas noter ce roman. pour te faire sourire Je sais que tu ne les vois pas mais parfois les publicités qui sont en bas de ton article me font sourire. Là on me conseillait de changer les pastilles pour nettoyer ma cuvette de WC …. merci Athalie !

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    1. Non, effectivement, je ne vois pas les publicités … Et j’arrive quand même à me souvenir qu’il faut de temps en temps, changer ces fameuses pastilles ! Oh bonheur de notre société de la « communication » …

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  2. Ça m’avait fait cet effet avec No home de Yaa Gyasi, les histoires qui s’enchaînent sans qu’on ait vraiment le temps de s’attacher aux personnages puisqu’ils disparaissent en fin de chapitre (bonjour au revoir^^), mais ici, ça ne m’a pas dérangée car j’ai particulièrement aimé le ton du récit et aussi découvrir l’histoire du Brésil de façon aussi accessible.

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      1. Merci.:) J’ai rajouté le tien dans le récap du book trip brésilien. C’est toujours intéressant des avis qui ne vont pas très exactement dans le même sens.

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  3. Ce « concept » me fait songer (de très loin, hein!) à une « série-concept » de bande dessinée, due à l’auteur Sirius, qui a publié durant plusieurs décennies dans Spirou ses « Récits de l’histoire du monde », en suivant une famille, les Timour (toujours un garçon, toujours rouquin, souvent des aventures guerrières mais avec une jolie fille dans l’histoire…) depuis la Préhistoire jusqu’aux temps modernes… Ca a bien donné une trentaine d’albums Dupuis, je dois en avoir un bon nombre dans un coin!
    (s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola

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