La petite menteuse, Pascale Robert Diard

lma_tribunal-judiciaireLisa a menti. Elle a accusé un homme, Lange Maro, de l’avoir violée et il a pris dix ans au premier procès. Le second se profile, et Lisa veut dire la vérité. Cet homme est innocent. Il était plâtrier, il a travaillé quelques temps sur un chantier chez ses parents, les Charret, un couple plutôt sans histoires mais depuis divorcés. Lange est un homme klenex, toujours quitté pour un autre, depuis les foyers d’accueil de son enfance, jusqu’à une scolarité ratée … Un profil de looser, quelques antécédents pas terribles, vols, bagarres, conduite en état d’ivresse, outrages divers … Chez les Charvet, il a bien eu des regards appuyés, des commentaires déplacés. Au premier procès, il a tout gâché. Agressif envers Lisa, ses protestations véhémentes n’ont pas été entendues face à la jeune fille. Lisa, elle, s’est évanouie. Dans la salle, l’émotion était de son côté à elle, jeune victime de 15 ans, en détresse face à un homme de trente deux ans, peu crédible.

Seulement voilà, Lange est innocent et Lisa veut le dire, c’est-à-dire, comme le formule sa nouvelle avocate, quitter son statut de victime pour endosser celui de la petite salope. Et ce va pas être facile, parce que cela fait 5 ans que l’accusé est en prison, cinq ans qu’elle a laissé parler témoigner ses parents, qui ont donné le nom du plâtrier à la police, que les deux professeurs du collège, qui avait remarqué le malaise de la jeune adolescente, ont mené leur petite enquête, en toute bonne foi, et que les amies de Lisa ont rapporté ses fausses confidences …

Cinq ans après, donc, elle veut tout dire, détricoter les mécanismes qui l’ont amener à laisser dire, à approuver, puis à confirmer. Cinq ans de prison pour Lange, et autant de silence coupable pour elle. Dans la balance, elle a tout à perdre. Ce pourquoi, elle ne veut plus de l’avocat prestigieux de Paris, et veut être défendue par une femme et elle a choisi Alice, la cinquantaine, rompue aux ficelles du barreau, mais au départ, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Alice manque d’enthousiasme. Elle est bien consciente que la période est catastrophique, pour Lisa, pour le procès. Rebattre les cartes de la parole de la victime, admettre le mensonge, c’est aller à contre courant de l’empathie dominante. Lisa va devenir la coupable. Et c’est tout le sujet de ce livre. Car Lisa n’a pas menti « pour rien », mais d’une certaine façon  » pour son bien » qui cachait d’autres fautes …

Passionnant sur le fond, la position du texte n’est cependant pas claire : il m’a vraiment manqué de savoir si ce récit est inspiré de faits réels ou est une extrapolation de l’autrice à partir d’un possible ( et très crédible) dérapage d’une ado qui a trouvé dans le mensonge une échappatoire, offerte sur un plateau par son entourage …  Ce qui n’empêche pas que la problématique posée ne manque pas de prise de risque, mettre en évidence la fragilité de la parole qui ne libère pas toujours …

8 commentaires sur “La petite menteuse, Pascale Robert Diard

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  1. Quelque chose me gêne dans ce roman, mais je n’arrive pas à mettre le doigt précisément dessus. Il faut dire que les billets ne sont pas très explicites et pour cause, il ne faut pas trop dévoiler le pot aux roses j’imagine.

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    1. Le sujet est gênant, je crois d’ailleurs me souvenir que lors de son passage à la grande librairie, l’autrice avait évoquée une sorte de polémique naissante sur ses intentions. Et non, on ne peut pas trop dire ce qui amène cette jeune fille à mentir, l’autrice nous amène à la comprendre pas à pas. Le récit est court, on fait vite les pas …

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  2. Je viens de le lire aussi ! Pari osé, en effet, on croit qu’il s’agit de remettre en cause la sacro sainte parole des victimes, alors que c’est surtout le procès de la manière dont est reçue cette parole qui est fait ici..

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    1. L’autrice a pris un risque certain, d’ailleurs plusieurs de mes amies ont grimacé quand je leur ai parlé du sujet de ce livre … qui est bien, comme tu le dis, celui de la réception de la parole. Les adultes ont voulu entendre ce qui était le plus « logique » à leur yeux.

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