Il met en scène un enfant autiste, atteint du syndrôme d’Azperger, pour être plus précise. Il a construit son monde bulle où le nombre de voitures rouges croisées durant le trajet entre son domicile et son école détermine si son humeur du jour sera très bonne, bonne, mauvaise, ou très mauvaise, où la couleur des aliments détermine ce qui peut, ou non, rentrer dans son estomac, où qui le touche détermine l’ampleur de son dégoût et de sa violence.
Christopher est tout entier dans son déterminisme dont il ne peut sortir et ses calculs incessants sont sa lecture du monde et sa carapace nécessaire. Dans un quartier tranquille, sa routine le protège, et son père fait de son mieux pour faire pareil, maintenant que sa mère est subitement morte.
C’est dans les limites de son territoire que le hasard va frapper, ce hasard qu’il ne peut supporter : il va retrouver le corps du chien de la voisine coupé en deux par une fourche et être accusé du crime, encore par hasard. L’enfant se décrète alors enquêteur et romancier, ce qui lui demande de faire pas mal d’entorses à sa carapace.
Le livre nous place dans la tête de l’enfant et ce choix implique les limites qui font que cette lecture ne m’a pas particulièrement passionnée ( euphémisme à relativiser). Je ne vais pas me lancer dans un « possible-pas possible », me mettre à juger du degré de crédibilité faisant qu’un enfant autiste puisse se lancer dans une fuite solitaire en train vers Londres avec uniquement son rat domestique en guise de panneau indicateur … Après tout, la possibilité que Fabrice se retrouve pile à Waterloo ou que Rastignac tombe pile sur la pension Vauquer, si on y songe, ce n’est pas très crédible non plus. Et on s’en fiche. Donc aux spécialistes de jauger l’aspect médical et moi ma lecture.
Le point de vue d’un enfant n’est pas un choix facile, il faut que l’enfant reste enfant et c’est risqué. Si on le veut crédible, l’enfant a l’analyse à courte vue et le vocabulaire assez répétitif, surtout quand il raconte (je n’ai rien contre les récits des vrais enfants, dont les miens, mais d’abord, ce sont les miens, ce qui m’enlève de l’objectivité, et les récits des enfants des autres, je les laisse aux autres, vu que j’ai assez avec les miens, qui sont généralement assez longs. Je me demande d’où ils peuvent tenir, cet art, (par ailleurs fort bien maitrisé) de la digression et des parenthèses …)
Par « courte vue », je veux dire que lorsque Christopher en arrive à une nouvelle révélation, ben, on l’avait vu venir depuis un petit moment déjà. Et, par répétitions, que lorsqu’il recommence à compter les voitures pour savoir si il va vivre un très mauvais jour, un mauvais jour, un bon jour, ou un très bon jour, j’avais juste envie de lui dire « Tais-toi ». D’ailleurs, c’est aussi ce que lui sa mère dans le livre, donc, j’ai une super excuse.
Mais le roman a des qualités, dont celle d’éviter les trémolos de la bienpensance en ne faisant pas un ange d’un enfant handicapé, en ne montrant pas des parents sanctifiés , mais des « normaux » qui s’énervent, se découragent, se fatiguent, délèguent, tentent d’avoir une nouvelle chance. l’amour n’empêchant pas l’exaspération et les erreurs, sinon, on le saurait …
Merci à C. pour le prêt !
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