Le monastère surplombe le village de Serra de’Conti. En ce début de XX ème siècle, dans l’Italie de la misère rurale, le poids de la religion est encore prégnant. Et si l’abbesse du couvent, soeur Clara, est capable de sortir les griffes pour protéger et rassurer les habitants soumis à l’autorité des maitres et possesseurs, ce n’est pas le cas du prêtre du village, Don Augustino qui les menace des feux du ciel à tour de sermons. Soeur Nella vient du village, elle a tout accepté du couvent, toutes les règles et presque tous les oublis ….
Mais l’action principale, se déroule dans le village, dans la famille de Nella, les Ceresa, dont le village dit qu’ils sont maudits. Violante, la mère, a perdu tellement d’enfants qu’on en tient plus le compte. Les survivants, quatre, s’entassent dans une seule chambre et rapidement, ils ne sont plus que deux, Lupo et Nicola. Elle ne les voit pas très bien, elle est en train de devenir aveugle, et un peu folle aussi … Luigi, le père, est méprisé par le grand père pour sa complaisance envers l’église et les bourgeois qui lui achètent son pain. Acariâtre, aigri, il laisse aller sa boulangerie à la faillite, par lâcheté et abandon. Le grand père est de ces paysans anarchistes qui sont écoutés en ces temps où la colère contre le roi courre dans les villes et se murmure dans les campagnes. La répression l’a contraint à l’inaction, mais ses paroles donnent un modèle de colère à son petit fils, Lupo, dont le nom dit la rage et le gout de se battre. Lupo, l’insurgé, entretient avec Nicola, son petit frère, une relation fusionnelle. L’un est la force qui va, l’autre est d’une fragilité de verre, pâle, blond, peureux, il craint le soleil, la vie, le mouvement. Lupo a passé un pacte avec le père, c’est son travail aux champs, son obstination à lui, qui permettra à Nicola de savoir lire et écrire puisqu’il n’a de place nul part dans le monde rural et encore féodal trop âpre pour le garçon, beau comme un prince et destiné, sûrement à être dévoré par un ogre si Lupo relâchait sa garde. Mais l’ainé est toujours là comme un rempart, il se bat contre la terre, contre le père, contre ces paysans qui sont si peu nombreux à s’élever contre les maitres. Il y croit au jour qui vient, sur les murs de la ville voisine, il écrit A bas les prêtres, il est de toutes les luttes, de tous les espoirs désespérés …
Lupo se nourrit de colère car ils vivent dans un monde qu’il rêve de faire exploser, les conquêtes sont infimes, les cris de misère réprimés. Alors Nicola est l’ombre nécessaire, dans une fraternité d’instincts.
Fraternité, résistance à la fatalité, histoire d’espoirs et de faillites. L’écriture porte cette histoire avec des élans épiques, lyriques, des traces de merveilleux et de légendes, qui dévalent les rues du village et ouvrent les portes du monastère et du secret de Nella qui s’y cache … De cette époque, trouble, où les maitres et l’église sont impunis et complices, sortira le fascisme, tapi dans les rancœurs. Mais au dessus du village, la musique de l’abbesse résonne comme un contre point. Elle qui fut enlevée au Soudan par des marchands d’exclaves, née Zeinab Alif, et qui cache sous son voile une force mystique incroyablement romanesque …
A savoir, ce personnage s’inspire d’une réalité, soeur Clara est une « vraie » sainte dont la statue protège encore le couvent de Serra.
religions que d’horreur ont été commises en ton nom!
pour parodier une citation célèbre
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La religion est présente dans son côté sombre et oppressant, mais aussi, par le personnage de Clara, comme une forme de protection pour les plus faibles, c’est un très beau personnage !
Et ce n’est pas la seule force du roman …
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L’écriture en fait un très beau roman, n’est-ce pas ?
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J’ai aimé mais pas immédiatement et l’écriture m’a parfois gênée… Ceci dit j’ai acheté son roman suivant…
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Je pense aussi que je suivrai cette autrice, le sujet de son dernier roman est plus contemporain, mais peu importe, si le traitement narratif a la même force !
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J’ai vraiment beaucoup aimé l’écriture, elle a quelque chose qui résiste à l’évidence. C’est parfois un peu elliptique, mais cela rend bien compte du tumulte de l’histoire.
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