Les anges noirs, Mauriac

Quel drôle de titre, vraiment …. car dans cette triste histoire, tous les personnages sont plus noirs que anges, sauf peut-être un jeune curé solitaire qui va se retrouver à sauver une âme, que ma foi, il n’avait pas vraiment cherchée ….

Le roman commence par une confession, écrite dans un cahier par Gabriel, la cinquantaine désabusée et malsaine d’un homme qui a trop vécu de son charme, et à destination du  jeune curé, justement, celui du village où Gabriel a passé une partie de ses vacances, enfant, puis adolescent, dans le domaine de Liogeats, au milieu du pin des Landes. Gabriel a failli devenir séminariste, lui, le fils d’un paysan inculte et violent, il avait si belle figure d’ange, qu’il a séduit les dame Du Buch, qui l’ont pris leurs ailes innocentes, et bourgeoises, de celles qui ont du bien, des terres. Mais la gueule d’ange cache une âme vicelarde et lucidement, il enrobe de son charme les deux cousines, la grosse, laide et pieuse Adila, et la plus volatile, Mathilde. c’est Adila qui succombera, aura un enfant, Andrès, et l’épousera, autant par haine que par repentir, des années plus tard …. Gabriel, lui, prend les maîtresses qui lui fournissent de quoi vivre, après Adila, ce fut Aline, mais celle-ci devient trop exigeante, alors, Mathilde, Adeline, l’une et l’autre ferait l’affaire ….

Au moment de la confession, le Gabriel, si la face reste juvénile, en quand même pris un coup dans l’aile. La confession, est, c’est le moins que l’on puisse dire, à charge.  Il a spolié son propre fils, Andrès, élevé par Mathilde sur le domaine de Liogeats, et alors que celui-ci s’apprête à voir se conclure le mariage arrangé de longue date entre lui, le demi paysan un peu frustre, materné par sa tante, et sa cousine à la triste figure, il va aller se mêler de ces arrangements à huis-clos.

Car huis-clos il y a dans, dans le château où se bruissent les intérêts financiers, les rancœurs passées, les arrangements et chasse trappe en sous-main. Les cinq personnages vont former deux clans, nichés dans leur tanière aux relents de conflits intérieurs et d’intérêts mêlés. Cinq, car le père Desbats, mari de Mathilde, père de Catherine, tisse pour Andrès une toute autre toile que celle entendue de longue date.

Les personnages sont chaotiques, tiraillés, contradictoires, ils se heurtent à leurs propres mensonges, se disent des vérités à demi-mots, qui sont autant mensonges que coup de dagues.  Et si l’intrigue est linéaire, elle manque de fluidité, comme les personnages, elle semble se heurter à ses propres frontières et déborde vers des rebondissements improbables et confus.

Un équilibre instable, quelque peu baroque, un rien de plus et Mauriac se lâchait la bride et nous faisait du drame à la Dumas sauce Simenon …. Paradoxalement, c’est qui fait l’étrange charme de ce roman, comme on peut aimer, finalement, dans un champ de vignes géométriquement alignées, le vieux ceps tordu qui a poussé de travers, les racines se dressant vers un ciel obscur.

Une lecture commune avec ma complice en pays mauriacien, Ingannmic une de plus pour la sagouine entreprise, mais lirons-nous un jour « Le sagouin » ?

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